Jeudi 14 novembre, à 10h, une centaine d’élèves – ambassadeurices harcèlement, délégué·es et suppléant·es – ont eu la chance d’assister à la représentation de la pièce ADN de Dennis Kelly, mise en scène par Ruben Chehadi. La compagnie montpelliéraine La Barak a proposé un spectacle brut et percutant dans le cadre du programme pHARe, un dispositif national de prévention du harcèlement en milieu scolaire.
Le programme Phare : un programme de lutte contre le harcèlement scolaire
Le programme pHARe, mis en place par l’Éducation nationale depuis 2023, est conçu pour sensibiliser et lutter contre le harcèlement dans les écoles, collèges et lycées. Il repose sur cinq grands piliers : éduquer, former une communauté protectrice, intervenir efficacement, associer les parents et les partenaires de l’école, et mobiliser les instances de démocratie scolaire. Ce programme s’appuie sur un réseau de responsables académiques et départementaux spécialisés dans la lutte contre le harcèlement. L’un des éléments centraux du programme est la communication du numéro d’urgence 3018, qui permet aux élèves et aux familles de signaler toute situation de harcèlement.
Une pièce saisissante : ADN de Dennis Kelly
La pièce ADN, écrite par l’auteur britannique Dennis Kelly, a été adaptée pour 7 comédien·nes par la Compagnie La Barak. Initialement conçue pour 11 comédien·nes, cette version a été retravaillée, notamment au fil de plusieurs résidences, offrant ainsi une approche plus intimiste et resserrée autour du groupe d’adolescent·es.
L’histoire de ADN plonge dans l’univers d’un groupe d’adolescent·es qui, après avoir isolé l’un des leurs en forêt, commet un acte irréparable. Pris entre culpabilité, remords et terreur, chacun·e réagit différemment face à la situation. Alors que certain·es se laissent submerger par la panique et la peur, d’autres, plus froids et stratégiques, décident de se protéger des conséquences de leur acte en mettant en place mensonges et manipulations, quitte à accuser quelqu’un à tort pour détourner les soupçons. L’un des personnages, plongé dans un mutisme glaçant, joue un rôle central dans cette dynamique, cherchant à maintenir le silence et à orchestrer, sans émotion apparente, un plan pour échapper à toute suspicion. À travers ces différents comportements, la pièce expose l’éventail des réactions humaines face à la culpabilité et à la peur, alors que le groupe doit naviguer entre ses propres mensonges et l’inquiétant retour de leur camarade.
Un dispositif scénique immersif et réaliste
Le choix du dispositif scénique a été particulièrement marquant. La scène bifrontale, avec deux publics face à face, a renforcé l’implication et l’immersion des spectateurices dans l’action. En plaçant le public de part et d’autre de la scène, la Compagnie La Barak a créé un espace où chacun·e se retrouvait dans la position d’observateurice impuissant·e, soulignant ainsi l’idée que nous pouvons toustes être témoins du silence et de l’inaction face à des comportements violents ou oppressants.
La salle polyvalente de l’établissement scolaire a été utilisée comme décor, ancrant l’action dans le quotidien des élèves. Ce choix a renforcé le caractère réaliste et troublant de la représentation, en rendant l’univers de la pièce encore plus proche de celui des jeunes spectateurices. Sans effets lumineux ni musique, la scénographie sobre a mis l’accent sur les performances des comédien·nes et le texte de Dennis Kelly (traduit), créant ainsi une tension palpable tout au long de la représentation. Les comédien·nes, magnifiquement crédibles, ont livré des performances puissantes qui ont mis en lumière la violence des rapports humains et la lâcheté qui peuvent se développer dans des situations de harcèlement.
Conclusion : un sujet difficile à aborder, mais essentiel
À l’issue de la représentation, les élèves ont eu l’opportunité d’échanger avec les comédien·nes et le metteur en scène. Cette rencontre offrait la possibilité d’approfondir les thèmes abordés par la pièce, en ouvrant un espace de dialogue avec les artistes. Les élèves ont posé des questions davantage orientées vers l’univers du théâtre en général, la mise en scène et le travail des comédien·nes. S’il est un peu regrettable que la discussion n’ait pas directement porté sur le sujet du harcèlement abordé dans la pièce, on comprend aisément la difficulté de traiter le sujet de fond directement après la représentation. Il est probable que le message et les questions soulevées par la pièce mûrissent dans l’esprit des élèves, et que ADN contribue, à sa manière, à déconstruire la culture du silence qui entoure trop souvent les situations de harcèlement.
Voici l’entretien réalisé avec les membres de la compagnie :
Jasmine Trilland
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